AG FAS Romandie 2023

L'assemblée a lieu dans l'ancien cinéma Eldorado situé dans la Maison du Peuple à Lausanne. Le bâtiment fait l'objet d'une rénovation au coup par coup, menée par le bureau Tardin Pittet. Blaise Tardin présente dans le hall d'entrée un rapide historique du bâtiment construit en 1961 par des architectes inconnus pour le cercle ouvrier lausannois. Signe que les temps changent, l'investissement devait être rentabilisé par le cinéma situé dans le ventre du projet dont la coupe révèle l'énorme volume. L'accès principal au cinéma étant condamné, c'est par la cage d'escalier que nous nous y rendons en descendant les trois étages qui nous séparent du niveau du quartier du Flon. A l'intérieur, le volume a été entièrement désossé, mettant au jour la structure en béton.

PERIPHERIE

Gilles Clément a dit qu’un jardin pouvait être dessiné seulement une fois réalisé. Il est vrai que ce n’est qu’en se retournant que l’on voit la trace que l’on a laissée. Elle n’était pas forcément préméditée. Elle nous apparait alors comme quelque chose de familier, et nous livre le secret de notre recherche.

En regardant l’année écoulée, nous nous apercevons que nous avons abordé le thème de la périphérie sous plusieurs formes. La première en écoutant le récit du périple le long des berges du Rhône explorée par les lauréats du prix Master FAS 2021. Un territoire ténu, une limite souvent fine mais bien marquée entre le bâti et la nature, entre l’eau et la terre.

La périphérie, c’était le thème du voyage dans les banlieues parisiennes, qui n’avait pas pu se réaliser en 2021 et que nous avons reporté au début de l’année. S’échapper du centre et plonger dans la zone, cette ancienne limite militaire inconstructible autour de Paris qui s’est développée en donnant naissance à des formes urbaines spontanées. Qu’il soit bucolique, terrifiant, industriel ou expérimental, le développement de la périphérie est un miroir dans lequel se reflètent nos craintes et nos espoirs. La vie y est riche, pauvre, foisonnante, asphaltée ou naturelle. Aller à sa rencontre, c’est aussi avoir pu rendre un hommage anticipé et involontaire à Renée Gailhoustet qui nous a quitté au début de l’année 2023.

Architecte de la périphérie, c’est comme ça que l’on peut définir Lluís Maria Vidal Arderiu architecte catalan, décédé en 2000, dont nous sommes allés voir le travail lors d’un voyage automnal dans les Pyrénées. Un architecte dont la pratique a été marquée par l’envie de s’extraire de l’agglomération barcelonaise pour construire au plus proche de ce qu’il ressentait, dans un territoire peu valorisé.

La périphérie, c’est aussi un mode de construction sans prétention, presque provisoire, comme ces chalets de Gruissan, rencontrés sur la route pendant notre voyage, alignés sur la plage, prêts à être reconstruits après la première tempête, c’est mille kilomètres en fourgonnette pour se rendre au four solaire d’Odeilló, berceau européen de l’énergie solaire. La périphérie c’est enfin le combat d’un petit village des Pyrénées, étape finale de notre road trip, qui s’est battu pour conserver un dolmen de près de 5’000 ans retrouvé sur son territoire et pour lui construire le plus beau des écrins.

La périphérie, c’est une manière de déplacer le centre, de respirer, de prendre de la distance et questionner les modèles et les préoccupations qui nous animent. 

Extrait du rapport annuel 2022 / Manuel Bieler, Nicolas Monnerat, présidents